En prenant chaque année le pouls des agriculteurs bourbonnais, le cabinet Cerfrance terre d’Allier, comptables leader du secteur agricole, met en évidence les bonnes pratiques qui permettent à ceux qui nous nourrissent…de vivre de leur travail.
En prenant chaque année le pouls des agriculteurs bourbonnais, le cabinet Cerfrance terre d’Allier, comptables leader du secteur agricole, met en évidence les bonnes pratiques qui permettent à ceux qui nous nourrissent…de vivre de leur travail.
Miser sur les circuits-courts
Les revenus ne sont pas mirobolants mais l’agriculture reste une activité attirante. C’est pourquoi Peggy Delage, commerciale pour la société agroalimentaire Mondelez pendant quinze ans, est en train de se reconvertir, en suivant une formation diplômante au lycée agricole de Neuvy. Dans son nouveau métier, les pieds dans la terre, la paille et le fumier, elle va appliquer des recettes très business.
Avant de rejoindre le GAEC de son compagnon, Frédéric Dunand, à Couleuvre, elle a réalisé une étude de marché : « J’étais en relation avec les responsables des magasins du centre de la France. Tous veulent promouvoir les produits locaux. Quand on a des vaches laitières comme nous et qu’on s’en occupe bien, on peut tout à fait imaginer de réaliser une partie du chiffre d’affaires en circuit-court. »
Jusqu’à présent, la totalité du lait était vendue à la fromagerie Déret à Theneuille. « Notre objectif est de transformer 10% de notre production. Après retour sur investissement, on pourra se permettre de racheter les terres que nous exploitons, détaille Peggy Delage. Progressivement, on va réduire le nombre d’allaitantes et faire davantage de culture pour se rapprocher de l’autonomie fourragère, même si les tourteaux de soja seront toujours nécessaires pour les laitières ».
Miser sur les produits de niche
D’autres voies sont possibles que les circuits courts, ce sont les produits de niche. Justement le soja français est un produit dont la demande progresse chaque année. C’est pourquoi la Coopaca, coopérative basée à Tréteau, a proposé à Elodie Capron de lancer une production de soja. « Jusque là, je faisais colza, blé, orge, maïs, classique », explique la jeune femme, 29 ans, qui s’est installée en 2015 à La Chapelle-aux-Chasses. Elle vend une partie de ses céréales mais la majorité sert à nourrir son cheptel.
« J’ai 35 vaches uniquement car j’ai plus que doublé la surface dédiée aux cultures. L’autonomie fourragère permet de réduire les coûts. Et pour garantir la production, je développe l’irrigation. Aujourd’hui, il y a un étang mais je ferai réaliser un forage. »
À l’image des agriculteurs qui réussissent, Elodie Capron ne veut rien laisser au hasard. « J’ai suivi une formation sur l’aromathérapie et je l’utilise pour prévenir et guérir certaines pathologies comme le “gros nombril” du veau. »
Améliorer la productivité
Pas besoin d’être labellisé “bio” pour essayer de faire les choses bien. A Lusigny, Matthieu Herbert utilise maintenant un fongicide à base d’algues : « Ça va permettre de diminuer l’utilisation de produits phyto et leur impact sur l’environnement, malheureusement, ce n’est pas moins cher ! »
Installé en polyculture-élevage depuis 2011, Matthieu Herbert dispose de 60 hectares d’herbe et 46 hectares de culture : « J’ai augmenté le nombre de bêtes : je suis passé à 60/65 vêlages par an, contre 45 pour l’ancien exploitant. L’engraissement en ration sèche est plus long mais moins cher que si je leur fournissais du maïs. J’ai adopté une nouvelle gestion du pâturage, tournant, qui permet de nourrir plus de bêtes sur moins de surfaces. J’ai aussi allongé les rotations des cultures, ce qui permet de mieux maîtriser le désherbage, de stabiliser les rendements. » L’amélioration de la productivité assure une meilleure rémunération.
Le trentenaire mise aussi sur la sécurité. Aussi, quand la Sicagieb à Montbeugny l’a mis en contact avec Mc Do, il n’a pas hésité longtemps. « Je m’engage avec Mc Do sur un nombre de bêtes et un poids six mois à l’avance. Je sécurise les débouchés. Je travaille sur la régularité, plus sereinement ».
Vendre à la ferme
Les agriculteurs sont de plus en plus nombreux à vouloir sécuriser les débouchés en développant la vente directe. Matthieu Herbert a créé une page Facebook Ferme Les Montillards et écoule ainsi un cinquième de la viande produite.
A Trévol, Thibaut Paridiot, 21 ans, a ouvert la page Facebook La Ferme de Titi, avant même de créer son activité en novembre dernier. Il y annonce qu’il sera bientôt possible d’acheter sur place des volailles fermières (poulets, pintades, dindes, chapons, canards) élevées en plein air et nourries avec les céréales de l’exploitation, mais aussi du veau de race Aubrac en colis de 5 kg, 10 kg et 15 kg.
« Mon étude de marché l’an dernier montrait que la demande sur Moulins n’était pas encore entièrement satisfaite, notamment au moment des fêtes. Mais c’est à Clermont et Paris que le potentiel pour la vente directe est important. Je compte réaliser une livraison par mois dans les grandes villes, en assurant un minimum de commandes grâce aux restaurateurs et bouchers. »
Réduire les charges
Pour maîtriser son produit jusqu’au consommateur final, et diminuer le nombre d’intermédiaires, Thibaut Paridiot va créer un laboratoire au printemps. Et ce n’est pas la seule astuce dans laquelle il a investi.
Pour la partie élevage bovins, le jeune agriculteur a fait construire une stabulation couverte de panneaux photovoltaïques avec revente directe à Enedis : « Le produit de la revente dépasse le montant des annuités, ça s’autofinance ».
La réduction des charges est synonyme d’amélioration du résultat. Un leitmotiv digne d’un patron du CAC 40 que les agriculteurs récitent mieux que personne. En reprenant l’exploitation de son père à Saint-Ennemond, Alexandre Variginier a optimisé son fonctionnement : « J’ai diminué le cheptel pour faire de la culture et j’ai pu acquérir une autonomie fourragère. Le prochain objectif c’est essayer de faire de l’ensilage d’herbe pour mieux la valoriser. »
Pour diminuer ses charges, le jeune homme de 27 ans a également créé une coopérative d’utilisation de matériel agricole (Cuma) avec d’autres jeunes éleveurs nouvellement installés à Saint-Ennemond.
Vendre sa production au juste prix
Pour maximiser leur revenu, les agriculteurs travaillent aussi à conjuguer la volatilité des prix de leur production.
À Coulandon, Carole Neyrial est membre de la toute nouvelle organisation de producteurs de lait de chèvre pour Rians près de Bourges. « L’OP va devenir l’organe officiel pour dialoguer avec la marque sur la quantité et les prix. Plutôt que chaque producteur négocie dans son coin, on va pouvoir harmoniser les pratiques, les contrats, tirer les prix vers le haut, anticiper les crises… »
Seize chevriers de l’Allier et trente-cinq autres du Cher sont membres de cette organisation de producteurs Rians Bourges, qui a déjà embauché une animatrice.
« Plutôt que chaque producteur négocie dans son coin, on va pouvoir harmoniser les pratiques, les contrats, tirer les prix vers le haut, anticiper les crises… »
La multiplication des CUMA et des organisations de producteurs démontre que la solidarité commence à entrer dans les mœurs des agriculteurs. Une nécessité pour peser dans le débat public et enjoindre la société et l’Etat à privilégier la qualité locale plutôt que des produits du bout du monde éventuellement moins chers.
Source : www.lamontagne.fr